Review: La Fille Du Train

De Tate Taylor


Sortie au cinéma le 26 octobre 2016 – Durée 1h53

 

Par Alexia Malige

 

La fille du train: passagère de l’ombre

Le sifflement du train retentit tandis que Rachel vide sa bouteille. Chaque jour est un éternel recommencement pour elle. Passer sa journée dans un wagon, l’esprit flottant, le liquide spiritueux disparaissant entre ses lèvres. Toujours le même parcours, toujours la même fenêtre. Elle observe les maisons et leurs habitants, et même si toutes se ressemblent plus ou moins, elle a sa préférée. Vivent ici deux jeunes gens qu’elle a idéalisés comme un couple parfait. Rachel est surtout fascinée par la femme, Megan, qui représente ce qu’elle a perdu et rêverait de retrouver. Son mari, son travail et sa maison. L’alcool l’a éloignée de tout. Elle n’a plus rien. Elle n’est plus celle qu’elle était avant.
Un matin, Rachel se réveille couverte de sang, les martinis de la veille lui embrumant la mémoire et ne lui laissant que de très vagues souvenirs de sa soirée. C’est ce même jour que la disparition de Megan Hipwell est annoncée dans les journaux. Rachel se retrouve très vite mêlée à l’enquête. Entre la réalité floue et fantasmée provoquée par la boisson et ses rares moments de lucidité, déceler la vérité ne sera pas facile pour elle.

Avec cette adaptation du bestseller éponyme de Paula Hawkins, Tate Taylor s’est attaqué à un thriller de la trempe du Gone Girl de David Fincher. De nombreuses similitudes peuvent être relevées entre les deux films, aussi bien dans les scénarii (la femme mariée parfaite qui disparaît) que dans le caractère des personnages. On se souvient d’une Amy Dunne froide, calculatrice et distante. Ici, dans La fille du train, Megan Hipwell a une personnalité effacée. Ses yeux sont vides. On n’y trouve rien. Comme si elle avait fait le ménage en elle. Comme si elle n’existait plus. Elle tient le spectateur à bonne distance, et il est impossible pour lui de s’attacher à une enveloppe charnelle dépourvue d’une âme. Haley Bennett fait un travail remarquable dans ce rôle de poupée inanimée, qu’elle incarne avec autant de détachement que de mystère. Les autres acteurs ne sont pas en reste : tous campent à merveille le rôle de leurs personnages compliqués et tourmentés. Notamment Emily Blunt qui nous propose une Rachel touchante, que l’on a envie de croire et d’aider. Son ivresse perpétuelle n’effraie pas, elle attriste. On ne comprend pas comment cette femme a pu s’enfermer dans ce cercle vicieux du corrosif miséreux. C’est sur ce point que réside la force du film. Le réalisateur réussit à créer une curiosité chez le spectateur, pas uniquement liée à l’énigme policière. Mais ce Cluedo géant connaît aussi des faiblesses, notamment quelques longueurs au milieu du film. Une histoire qui tourne parfois en rond, sans élément nouveau et surprenant, ce qui laisse le spectateur sur sa faim.
La fille du train est un bon thriller, qui tient en haleine et offre une fin inattendue et déconcertante. Seulement, ses quelques petits déraillements et sa direction parfois trop linéaire ne lui permettent pas de dépasser Gone Girl, qui reste pour nous la référence.

PS : Les fans de séries télévisées seront heureux d’apercevoir la célèbre Phoebe de Friends (Lisa Kudrow) ainsi que la sombre Alex Vause de Orange Is The New Black (Laura Prepon). Toutes deux pointent le bout de leur nez sur grand écran, un court passage qui suffira à donner du baume au cœur aux groupies.