Hélène Béguin est une Alumni HEC depuis 1987. Directement à la fin de ses études, elle a rejoint KPMG Suisse dont elle fait toujours partie en tant que membre du conseil d’administration depuis 2014.
Vie professionnelle
Parlez-moi de votre parcours.
Mon parcours d’étudiante est assez simple. J’ai fini HEC Lausanne en 1987. À l’époque, il n’y avait pas le master. Tout était inclus dans le diplôme en tronc commun. À l’époque, les différents évènements de networking avec des entreprises étaient déjà organisés. C’était facile pour un étudiant HEC de voir ce qu’il s’offrait à lui, surtout lorsqu’on avait une formation très généraliste. Comme chaque étudiant, j’ai participé aux présentations et certaines choses m’ont plus parlé que d’autres. C’est comme ça que j’ai fait le choix réfléchi d’aller dans une des Big Four (qui étaient sept à l’époque). Je suis rentrée chez KPMG pour les personnes que j’ai rencontrées, leur personnalité.
Les choses se sont ensuite enchainées en fonction des opportunités qui se sont présentées. J’ai fait durant de nombreuses années de l’audit bancaire à Genève. Ensuite, il y a toujours un moment dans la vie professionnelle où l’on se questionne. Je me demandais si je ne voulais pas changer de métier, car bien que passionnant, il n’en demeure pas moins difficile et contraignant. La réflexion est venue également parce que j’avais des enfants. Finalement, c’est une profession tellement enrichissante que je n’ai pas trouvé autre chose qui me donne autant d’adrénaline ailleurs. Et c’est la raison pour laquelle je travaille toujours chez KPMG après trente ans.
J’ai alors eu l’opportunité de quitter l’audit bancaire et de travailler à Fribourg pour des sociétés complétement différentes de ce milieu. Le métier n’était pas foncièrement différent, mais les gens et les business l’étaient ce qui a fait que j’ai appris de nouvelles choses. Cette nouveauté me plaisait. Si je regarde ces trente années de carrière, je n’ai jamais fait la même chose plus de quatre ans. Je n’ai jamais connu la lassitude. Quand on me proposait des nouvelles expériences, je disais rarement non. Certaines choses me faisaient peur, mais m’attiraient également. C’est aussi ça qui nous fait nous développer.
Vous mentionnez l’adrénaline, qu’est-ce qui vous en donne?
Le fait qu’il n’y ait pas de routine! Il y une part importante d’incertitudes et d’imprévus à gérer. Il faut avoir des idées. On peut penser que nous faisons un métier de chiffres pas très glamour, mais il y a une part de créativité et d’innovation importantes qui nous sont propres et qui nous obligent à nous remettre en question.
Quels ont été les éléments qui vous ont conduit au poste de membre du conseil d’administration (Board of Directors)?
J’ai réalisé que j’avais une influence, que j’avais un avis qui comptait, que je représentais la minorité romande ainsi que celle des femmes. J’avais acquis suffisamment de confiance en moi pour me dire que c’était le bon moment et que je pouvais être candidate [aux élections]. C’était un challenge d’essayer de convaincre une majorité de personnes, essentiellement basées en Suisse alémanique et que je ne connaissais pas beaucoup, de voter pour moi. Le refus de ma candidature m’aurait coûté. Ainsi, comme j’étais loin d’avoir l’assurance d’être élue, j’ai travaillé et me suis préparée ; j’ai rencontré un grand nombre de personnes pour mieux me faire connaître.
D’une manière plus générale, quels sont les profils ou qualités types à avoir pour des rôles de leadership comme le vôtre?
Dans une entreprise comme la nôtre, les leaders ont un rôle très important ; nous devons donner envie aux gens qui travaillent avec nous. On doit les inspirer, leur insuffler le désir de se dépasser et de contribuer au succès de l’entreprise. Il faut donc un minimum de qualités humaines et la capacité de transmettre cet engouement et cette passion que l’on a pour notre métier afin de les emmener avec nous. Si on est plutôt introverti, solo player et narcissique, c’est impossible.
Vous avez d’autres rôles que celui chez KPMG. Vous êtes présidente du conseil consultatif Vaud et Valais de la Banque Nationale Suisse et membre du Comité de la Chambre Vaudoise du Commerce et de l’Industrie (CVCI). Est-ce que c’est une volonté professionnelle de votre part d’avoir plusieurs casquettes ou des opportunités que vous avez saisies?
Quand on fait partie du monde de l’économie de la Suisse Romande, on crée des liens avec d’autres personnes dans d’autres organisations, entreprises, etc. On se fait connaitre ; ainsi, des personnes nous approchent pour nous proposer des rôles dans des organisations. D’abord, j’y réfléchis par rapport à mon emploi du temps. Il faut que cela soit quelque chose qui m’intéresse et pour laquelle je peux avoir un impact positif grâce à mes compétences et mon expérience. C’est intéressant de rencontrer d’autres personnes, de discuter de nouveaux sujets, de confronter ses perspectives à celles d’autres acteurs du monde de l’économie. Par exemple, à la Chambre Vaudoise de Commerce, on aborde également les sujets politiques d’actualités ou des questions stratégiques pour le canton. Ce sont des sujets que je n’aborde pas toujours dans le métier que je fais.
À propos de KPMG
Les sociétés internationales ayant leur siège en Suisse sont votre spécialisation. De votre point de vue, quels sont les attraits de la Suisse pour ces dernières?
Outre la question fiscale qui n’a jamais été un sujet primordial, la Suisse, par sa culture du compromis, offre depuis longtemps de la stabilité et un environnement politique très sain, sans volatilité au niveau des stratégies politiques ou des successions de gouvernement. D’autre part, nous sommes au cœur de l’Europe, avec un niveau de vie excellent et des personnes bien formées et multilingues. Culturellement, il n’est pas compliqué non plus pour des gens de l’étranger de s’implanter. Tous ces facteurs-là contribuent bien au-delà de la question fiscale à l’attractivité de la Suisse. Si la prochaine votation sur la fiscalité est approuvée (ce que je souhaite fortement), je doute que cela fasse partir les multinationales. Le plus important est de garder les conditions que je viens d’évoquer.
Dans quelle mesure la question environnementale est-elle traitée par KPMG? Est-ce qu’elle entre en compte dans les recommandations que l’entreprise donne à ses clients?
Un de nos services établit des attestations pour des entreprises qui souhaitent faire valider leur responsabilité sociale, notamment en matière d’environnement : La majorité des grandes entreprises, en effet, est intéressée à mesurer ses émissions de gaz ou sa consommation d’eau et d’électricité afin de mettre en place des moyens pour en réduire l’impact.
En tant qu’entreprise, nous sommes également sensibles à la question. Nous donnons des conseils, mais nous avons également une responsabilité. Nous essayons au sein de KPMG d’être en adéquations avec les conseils que nous dispensons à nos clients
Beaucoup de gens ont le sentiment que même si des choses sont faites pour l’environnement, ce n’est pas assez. Est-ce que KPMG a des objectifs clairs à atteindre en ce qui serait « assez », ou est-ce plutôt un processus d’amélioration continue?
Je pense que c’est une amélioration continue. Notamment, en tirant parti des outils technologiques à disposition ; un simple exemple : celui de pouvoir configurer toutes nos imprimantes de manière à ce que les tirages se fassent, par défaut, en recto verso et en noir/blanc. La numérisation a également permis de nous passer presque complétement du papier. Dans notre secteur d’activité, cela représente des économies à large échelle, aussi bien en matière de fourniture que de d’archivage. Nous avons mis en place des fontaines plutôt que d’acheter l’eau en bouteille PET. Nous encourageons activement notre personnel à privilégier les transports publics et la mobilité douce. Nos nouveaux bureaux genevois qui seront situés à côté de la gare de Lancy-Pont-Rouge vont d’ailleurs certainement contribuer à changer les habitudes qu’ont nos collaborateurs de se déplacer. Il faut toutefois relever que nous sommes une société de services, nous ne fabriquons rien : Il est donc plus facile de prendre des mesures pour limiter notre impact sur l’environnement. Il faut également voir et reconnaitre ce qui est fait, même si on est militant du changement. Bien sûr, on peut prétendre que ce n’est jamais assez, mais les entreprises suisses sont quand-même très responsables. Dans d’autres pays, ce n’est pas toujours la même chose. Il n’y a pas de pression, pas de volonté. De mon point de vue, en Suisse, nous sommes sur la bonne voie.
Luca Bron
KPMG Switzerland