Il n’est peut-être pas le philosophe de l’antiquité grecque le plus attirant, ni le plus transparent et simple d’accès mais Aristote (385/384 – 322 avant notre ère) est pourtant celui qui marqua le plus profondément la philosophie et les sciences et cela jusqu’au 16ème siècle. Disciple de Platon, puis enseignant au sein de l’Académie, il fondera plus tard le Lycée, où il enseignait en se promenant avec ses élèves. Il se détachera de la pensée de son maître tout en continuant d’étudier une certaine métaphysique chère à ce dernier. Véritable homme-encyclopédie, il couvrira, de son vivant, l’ensemble des champs du savoir de son temps ; il en est, si ce n’est la première, la plus grande des synthèses.
De l’importance de quelques prolégomènes biographiques
La vie d’Aristote reste la meilleure entrée en matière au sujet de sa philosophie. Il naît à Stagire, ville située en Chalcidique, péninsule du nord de la Grèce s’avançant dans la mer Égée. Cette cité faisait alors partie de la Macédoine grecque, royaume dominant lors de la période hellénistique – période s’étalant des conquêtes d’Alexandre du 3ème siècle à la période romaine, quelques décennies avant notre ère. Aristote est fils de médecin et pas n’importe lequel car son paternel, Nicomaque, est le médecin du roi Amyntas III de Macédoine. Il y a donc, au sein de son enfance, des contacts avec les scientifiques, les physiologues et les médecins ; contexte qui, nous le verrons, marquera la pensée du philosophe. À la mort de son père il quittera Stagire pour Athènes et sera admis à l’Académie de Platon. Il a alors dix-sept ans. Il vivra alors un véritable choc intellectuel face aux nouveautés introduites par les enseignements de Platon. Dans ses premiers écrits, on ressent clairement sa dette envers son maître.
En 347, à la mort de Platon, il quitte l’Académie. Il y aura passé une vingtaine d’années tant comme élève qu’enseignant. Disciple dont la vive intelligence fut remarquée par Platon, il sera appelé par son maître « le liseur » – car Aristote est son anagnoste, celui qui lit les écrits de ce dernier dans ses cours. De retour en Macédoine, après avoir fondé des écoles de philosophie avec d’autres philosophes platoniciens – notamment au port d’Assos et sur l’île de Lesbos – il deviendra le précepteur d’un certain Alexandre le Grand alors âgé de treize ans. Le père d’Alexandre, Philippe II, soumettra les cités grecques d’Athènes et de Thèbes, assurant alors l’hégémonie de la Macédoine sur le monde grec en préparant les campagnes contre la Perse Achéménide que sont fils dirigera après sa mort. C’est dans ce contexte qu’Aristote retourne à Athènes pour y fonder son école : le Lycée. Les péripatéticiens en seront les élèves, car on y discutait et enseignait en se promenant. À sa mort, sa pensée tombera dans l’oubli – mais seulement pour certains. Depuis la chute de l’Empire Romain jusqu’au 11ème siècle de notre ère, l’Occident n’a bénéficié que d’un accès restreint à sa pensée. C’est au travers des traductions arabo-latines – véritable matrice d’une grande partie du développement de la philosophie et des sciences au moyen-âge – que l’on redécouvrira Aristote, au même titre qu’Hippocrate pour la médecine et d’autres philosophes antiques oubliés mais aussi la pensée des grands philosophes arabes tels qu’Al-Kindi, Avicenne ou Rhazès car les monde Byzantin et arabe, eux, n’ont jamais arrêté d’étudier les philosophes antiques. C’est au sein de l’Espagne musulmane que cette grande entreprise de traduction de l’arabe au latin prendra place ; on peut alors parler d’une véritable Renaissance avant l’heure, période d’immense érudition, de contacts et d’échanges tant culturels que religieux, tant philosophiques qu’artistiques !
Une encyclopédie avant l’heure
La pensée d’Aristote aurait eu de quoi faire rougir les auteurs encyclopédiste des Lumières comme Diderot et D’Alembert. De son vivant, il couvrira l’ensemble des savoirs de son temps ; il en offrira une synthèse pour le moins complexe mais fascinante. C’est à lui qu’on doit une séparation entre les différentes branches de la philosophie – que l’on retrouve encore en partie aujourd’hui. Selon lui, il y a trois sciences distinctes, toutes liées à une activité humaine en particulier se manifestant en chacune d’elles. Ces activités de l’humain sont le savoir, l’agir et le faire. Les trois champs de la philosophie sont quant à eux :
- Les sciences théorétiques – qui visent un savoir pour le savoir, la contemplation et la compréhension de la réalité comme de sa finalité. Il s’agit de la métaphysique, qui se penche sur l’être ou le transcendant, de la physique, qui elle se penche sur les principes du réel, des mathématiques ou encore de la psychologie, au sens de la science de l’âme ! Ces sciences sont liées au savoir.
- Les sciences pratiques associées à l’agir. Il s’agit de l’analyse des actions de l’être humain ; ce sont la morale, l’éthique et, par extension, la politique lato sensu.
- Les sciences poétiques associées à la création artistique, au faire. Ces dernières comprennent l’architecture, la poésie, la musique ou la rhétorique.
Dès lors, on comprend mieux l’influence que les contacts du jeune Aristote avec la médecine et la science de l’époque auront sur sa pensée. Il enseignera toutes ses branches. Au sein de l’Académie, un axe central des études était la métaphysique de Platon. Toutefois, avec Aristote, on va étudier de manière scientifique l’ensemble du savoir.
Savoir rompre avec son maître
La pente que l’on emprunte lorsqu’il est question des liens entre pensée aristotélicienne et platonicienne est glissante. On ne connaît la doctrine d’Aristote que par les écrits exotériques dédiés à un public plus vaste que celui de l’Académie – textes perdus mais dont on connaît en partie le contenu grâce aux citations, commentaires et imitations des auteurs anciens postérieurs au philosophe – et l’autre catégorie d’œuvres que sont les écrits ésotériques, réservés à l’enseignement oral au sein du Lycée – des notes sous forme de manuscrits. Le traité De l’Âme est l’exemple le plus connu des premiers et la Métaphysique est l’œuvre principale des seconds. Apparaissent alors deux Aristote ; l’un perdu, reconstitué par les auteurs postérieurs et l’autre conservé au travers de ses manuscrits. Cependant, ce dernier n’a rien publié par lui-même. En résulte alors que des traités comme la Métaphysique nous apparaissent comme des patchworks d’une douzaine de petits traités aux finalités multiples regroupés par des éditeurs postérieurs – ce qui n’aide en rien une lecture déjà laborieuse de la philosophie complexe du personnage… Le corpus de sources étant un véritable casse-tête, on a souvent voulu voir une évolution d’Aristote dans ses écrits. Certains écrits étant pleins d’admiration pour son maître et se rapprochant plus de la vision platonicienne, auraient par la suite cédé la place à une critique de la philosophie de Platon. Cette vision est séduisante mais l’inverse est tout autant valide ; il est aisé d’imaginer un jeune Aristote cherchant la confrontation avec les idées de Platon et qui, en prenant de l’âge, reprendra en partie les idées du maître. Le débat n’est pas clos.
Cela étant dit, quelle est la différence entre maître et disciple ? Il faut, nous dira Aristote, savoir critiquer son maître. « Si les amis et la vérité nous sont également chers, c’est à la vérité qu’il convient de donner la préférence » nous dira-t-il dans son Éthique à Nicomaque, en faisant référence à Platon. Sur quels points il y a-t-il rupture ?
La critique prend place dans la théorie des Formes de Platon. La vraie substance, pour ce dernier, était le monde des Idées, des Formes et non le monde physique. Pour Aristote, il est certain que l’on a besoin de l’intelligible pour parvenir à expliquer le réel. Toutefois, ce dernier trouve les liens entre réalité et formes peu convaincants ; Platon n’a jamais décrit ces derniers de manière claire, il s’agissait d’un lien de participation et d’imitation. Aristote nous dit que les formes ne peuvent être transcendantes ! La réalité, les choses sensibles doivent forcément contenir leurs causes en elles-mêmes ; on ne peut séparer le plan sensible du plan intelligible. Attention, il ne nie pas la transcendance mais la réserve à la métaphysique qui concerne le plan d’une cause divine, une intelligence suprême qui exprime le réel – nous y reviendrons.
En somme, il gardera la doctrine des Idées, des Formes mais replace cette structure intelligible au sein des choses sensibles. Les Formes et Idées ne peuvent se trouver ailleurs que dans le monde sensible, dans la réalité, étant donné qu’elles en sont la cause, qu’elles l’expliquent. La rupture est nette : chez Platon, la perspective qui expliquait sa théorie était mystique – on ne pouvait connaître ces dernières que par le concept de réminiscence. Pour Aristote, il y a une volonté d’empirisme. Il échappe à la dichotomie entre sensible et intelligible que l’on trouve chez son maître ; le réel, le sensible n’est ni la Forme ni la matière, il est le composé, l’union des deux ! Aristote nous offre la synthèse entre la perspective présocratique – axée sur la physis, la nature et le sensible – et les Formes, l’intelligible !
Âme, substance, matière et forme
Selon Aristote, l’âme est le « principe d’explication de tout être vivant naturel ». Penchons-nous plus en détail sur son traité de l’âme, le De Anima en latin.
Étant donné que l’âme est le « principe d’explication » de la vie naturelle, on peut voir cette dernière comme un principe biologique. Mais quel est ce « principe » ? Selon lui et comme le nom l’indique, il s’agit d’un premier commencement ; en somme : un point d’origine. Elle est ce dont quelque chose résulte et ne résulte pas, elle-même, d’autre chose. L’âme est donc ce qu’on doit présupposer si l’on cherche à expliquer le vivant !
Le sensible, la Substance selon les mots d’Aristote, l’ensemble des objets naturels – comme vous et moi – sont formés, nous l’avons vu, de matière et de forme. La forme d’un objet naturel est sa nature ; la matière est le matériau dans lequel cette dernière réside. Ici, l’âme devient alors l’essence, la forme du vivant naturel : « Nécessairement, donc, l’âme est l’essence – au sens de la forme – d’un corps naturel qui a la puissance de vivre ». Aristote sépare ici les objets vivants naturels des autres objets car leur nature est celle d’un mouvement spontané ; pour résumer grossièrement – son développement étant plus que complexe et nécessiterait de bien plus amples explications pour y faire justice – le mouvement est une propriété de tout objet naturel cependant, les objets naturels vivants se différencient du reste des objets par le fait que leur principe de mouvement est actif tandis qu’une pierre, objet inanimé, ne peut se mettre en mouvement que passivement – par accident selon Aristote, si on la heurte on qu’on la lance, etc.. En somme, ce qui caractérise ce qui est animé, les objets naturels ayant une âme, est la spontanéité, au sens où ils peuvent entamer d’eux-mêmes les processus qui leur sont propres. L’âme définit donc le vivant.
La forme, l’âme des objets vivants naturels est indissociable de sa matière, nous l’avons vu. Âme et matière sont les deux faces d’une même pièce, totalement inséparables. L’être humain ne peut donc se concevoir en dehors du composé corps-âme ! Cette conception des objets naturels formés de deux composantes consubstantielles que sont la forme – du grec morphè – et la matière – du grec hylè – un des principaux concepts de l’œuvre philosophique d’Aristote sera ultérieurement appelée « hylémorphisme ». Le philosophe ira jusqu’à douter qu’on cadavre puisse encore être un corps humain puisque c’est le corps vivant et non le corps mort qui est matière de l’âme ! Sans forme, sans âme, le corps cesse d’être ce qu’il est ; l’âme définit le corps vivant, les activités de l’âme sont toujours celles d’un corps vivant.
Aristote proposera trois niveaux de l’âme ; il s’agit des facultés de cette dernière. Le premier est l’âme végétative – elle régit les besoins primaires, les fonctions vitales. Il s’agit du niveau le plus élémentaire ; les végétaux ne bénéficient que de ce dernier. Deuxièmement, on trouve l’âme sensible. Cette dernière relève des sensations et du mouvement. Les animaux bénéficient de ce second niveau ainsi que du premier. Finalement, l’âme rationnelle, quant à elle, est la capaciter de penser, de connaître, de vouloir, etc.. Vous devinerez aisément qui jouit de cette dernière – en plus des deux premières. Aristote réhabilite alors les passions, les besoins, les désirs, les appétits et les émotions au sein de l’âme et, de la sorte, résout l’intellectualisme socratique qui, rappelez-vous, se basait uniquement sur la faculté de l’âme à connaitre le bien et le mal.
Le dernier « niveau » de l’âme, la partie intellective peut continuer d’exister après la mort ; il y a une immortalité de la partie rationnelle de l’humain. Il n’étudiera pas plus la question ; il souscrit à la théorie platonicienne.
Vous avez dit moteur immobile ?
Aristote nous apprend que les substances sensibles, le vivant est un composé de matière et de forme, certes, mais existe-t-il des substances suprasensibles ? Platon, son maître, avait découvert un plan transcendant. Ce dernier existe-t-il aussi chez Aristote ?
Tout ne se résout pas au travers des substances sensibles, d’une dimension empirique chez Aristote. En effet, ce dernier affirme lui aussi qu’il existe un monde transcendant – somme toute différent de celui de Platon. C’est dans Physique et Métaphysique que le philosophe nous propose trois typologies de substance. Deux sont de nature sensible. Il s’agit premièrement du terrestre avec tout ce qui naît et péri. Ce sont des substances corruptibles – comme vous et moi – dont on fait l’expérience tous les jours. À cela s’ajoute des substances incorruptibles ; ce sont les astres, les planètes, les cieux et autres corps célestes. Quelles sont les différences entre ces deux typologies de substance ? Les premières sont composées d’air, de terre, d’eau et de feu. Les substances incorruptibles, quant à elles, sont composées des mêmes quatre éléments mais un cinquième les démarque des premières : l’éther. Cette essence, le cinquième élément, est incorruptible. Aristote utilise le dieu Ether pour parler d’éléments physiques. Il est une divinité primordiale – existant avant l’arrivée des dieux de l’Olympe – tantôt fils de Nyx, la Nuit et d’Érèbe, les Ténèbres, tantôt celui de Chronos. Il personnifie le ciel dans ses sphères supérieures où l’air est pur et chaud ; c’est l’air que respirent les dieux contrairement à l’Aer, respiré par les mortels. Ce dernier, chez Aristote, assure le mouvement local et circulaire des planètes. Ces dernières tournant toutes autour de la terre. C’est le géocentrisme qui influencera les sciences jusqu’au 16ème siècle – bien que la réflexion sur des sphères s’animant autour de notre globe est plus vieille qu’Aristote – avant d’être remis en question par Galilée, pour ne citer que lui !
Aristote imagine deux mondes : l’un sublunaire – tout ce qui se trouve sous la lune, donc la Terre et, par extension, les substances corruptibles – et l’autre supralunaire, les astres, les planètes de nature incorruptible et inaltérable, constante. Pourtant, ces deux mondes, bien qu’étant qualitativement différents dans leur altérabilité, restent sensibles, naturels. C’est ici qu’intervient une troisième substance selon Aristote : insensible, transcendante, invisible, elle se trouve au-dessus des astres et des planètes. C’est un dieu immobile, un moteur immobile qui préside au mouvement de toute chose. L’oxymore peut prêter à sourire, allons plus loin. Le philosophe se pose la question du temps et du mouvement : a-t-il été engendré ? peut-on détruire le temps ? qu’y avait-il avant le temps, et après ? Pour lui, le temps existe depuis toujours, il est éternel et ne peut périr ; il en est de même pour le mouvement qui est « une détermination du temps ». Ces deux existent donc depuis toujours. Aristote cherche alors la cause, qui doit elle aussi forcément être éternelle, du temps et du mouvement ! C’est ici qu’intervient le moteur immobile, le dieu immobile d’Aristote. Il est forcément parfaitement immobile car il engendre le mouvement des sphères et des planètes ; c’est un « acte pur », une puissance pure qui ne peut changer et qui est identique à elle-même. Comment se fait-il qu’une instance immobile puisse assurer le mouvement de tout ce qui existe ?
Afin d’expliquer cette causalité, Aristote pose le désir et le sujet qui désire. Le moteur immobile met tout en mouvement en tant qu’objet d’amour ! Tout est en tension vers ce dieu, tout est attiré vers par cette cause, c’est objet d’amour universel. C’est une attraction : le divin attire à lui toute chose. Nous nous trouvons donc face, chez Aristote, à une téléologie – de telos, « la finalité ».
Notons qu’elle n’est pas la seule substance suprasensible ; en plus de ce moteur premier, de cette cause absolue, on trouve un certain nombre d’autres causes transcendantes toutes assurant le mouvement d’une sphère céleste en particulier – il faut croire que c’était trop en demander au premier moteur immobile ! Ils sont au nombre de cinquante-cinq car, selon la physique de l’époque, il y avait cinquante-cinq sphères – planètes, astres, etc. – au total. Ces moteurs plus « locaux » ont les mêmes caractéristiques que celui vu plus haut. Toutefois, le moteur « dieu » est le premier du point de vue métaphysique et explique l’unicité du monde, de tout le système.
Une autre caractéristique du premier moteur, en plus de l’invariabilité, de la totalité, de l’éternité ou de l’immobilité est sa vie. Aux yeux du philosophe elle est la plus parfaite ! C’est une vie contemplative, une vie théorétique – de theoria, la « contemplation ». Ce dieu est vie, une vie de pensée. Il se contemple lui-même. Cependant, il ne contemple pas l’univers, ne connaît pas les individus en tant que tels ; eux sont corruptibles, il ne pense alors qu’à lui-même. Au sein de ce premier moteur, il y a identité entre la faculté de penser – l’intellect – l’objet de la pensée – lui-même – et le procès par lequel il s’appréhende – l’intellection. Il y a unité entre ces trois dimensions. Le sujet, l’intellection et l’objet ne font qu’un dans sa vie qui n’est que vie de pure pensée !
Notons que Plotin (205-270 de notre ère), penseur néoplatonicien gréco-romain, sera fortement influencé par cette vision et prolongera cette dernière en affirmant que le premier moteur « ne pense même pas ». Pour lui, la dualité sujet-objet est incompatible avec l’unité absolue du divin ! Se dégage alors un Aristote comme véritable précurseur de la théologie négative, discipline portée par Pseudo-Denys l’Aréopagite – drôle de nom qui cache probablement un moine mystique Syrien de 500 de notre ère, source d’un certain Denys l’Aréopagite, chrétien athénien difficile à identifier qui serait plus probablement un masque permettant au Pseudo-Denys de présenter son œuvre comme une philosophie chrétienne mystique – discipline selon laquelle on ne peut parler de dieu, du divin que part négations, sa nature étant ineffable et insaisissable.
L’influence d’Aristote sur près de dix-neuf siècles de réflexion philosophique se fera sentir dans la pensée chrétienne avec l’empreinte que sa pensée laissera sur Thomas d’Aquin mais aussi sur le développement de la scolastique, cherchant à relier théologie chrétienne avec la vision d’Aristote. La médecine arabe ou occidentale, jusqu’aux premiers balbutiements de la médecine moderne au 16ème siècle, sera principalement influencée par la théorie des humeurs d’Hippocrate, elle-même basée sur la théorie des quatre éléments d’Aristote – bien que ces derniers aient déjà été théorisés par Empédocle, penseur présocratique. Finalement, il faudra attendre Galilée et Francis Bacon – ainsi qu’un certain Newton qui assénera le coup de grâce – pour que le système géocentrique aristotélicien s’écroule, emportant avec lui un monde fini, ordonné, incarnant une parfaite hiérarchie.