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Made in HEC : Sara Gnoni

Des grands cabinets d’audit à l’entreprenariat, Sara Gnoni a un parcours atypique. Elle est passée du Senior Management à la fondation de sa propre entreprise, en passant par l’engagement politique. Elle est aussi aujourd’hui une véritable militante pour les droits humains et pour notre environnement. Retour sur une Alumni qui a un impact positif !

Peux-tu te présenter, autant professionnellement que personnellement ?

Je m’appelle Sara et je vais avoir 40 ans le 13 mai – un highlight de l’année ! Je suis maman de deux enfants de cinq et bientôt sept ans. Même si je suis née à Lausanne, j’ai des origines italiennes et j’ai vécu plusieurs années à l’étranger : une année aux États-Unis, deux années à Singapour, ainsi qu’un petit séjour en Espagne. J’aime bien me confronter à d’autres cultures mais pour des périodes plus longues, pour pouvoir vraiment m’immerger. Je suis beaucoup dehors, j’aime faire du paddle et de la randonnée de montagne.

Sinon, au niveau professionnel, je suis aussi engagée dans des associations et dans le mouvement Extinction Rebellion, je suis conseillère communale Verte à la Ville de Lausanne et j’ai fondé The Positive Project il y a à peu près trois ans.

Comment décrirais-tu ton expérience à HEC Lausanne ? Qu’est-ce qui t’a le plus marqué ?

Ça remonte ! Ce qui est intéressant, c’est de voir avec le recul à quel point l’éthique était absente à l’époque de ma formation. Le Prof. Palazzo a commencé à HEC Lausanne lorsque j’ai terminé, alors je n’ai jamais eu de cours d’éthique. L’ambition de la plupart des étudiant·e·s de l’époque était de faire du marketing pour pouvoir vendre, de bien gérer les choses, de maximiser le profit. Tout tournait autour de cette notion de l’homo œconomicus, qui rationnellement va choisir ce qui est bien ou mauvais pour lui.

Dans ton parcours professionnel, tu es passée des Big Four à l’entreprenariat, avec The Positive Project. Qu’est-ce qui a engendré ce changement, et quelles en ont été les étapes les plus difficiles ?

J’ai été 10 ans dans deux cabinets différents de Big Four. J’étais en quatrième année de Senior Manager : tu as un salaire très confortable, un bonus, le téléphone est payé, tu as des frais forfaitaires, les repas et les transports sont payés. On travaillait énormément, mais c’était avec des clients très intéressants et dans des conditions, en tout cas financières, qui étaient très confortables.

Malheureusement, tu restes un peu dans cette logique de maximisation du potentiel humain, le plus longtemps possible, et c’est aussi pour ça qu’on trouve une structure pyramidale dans ces entreprises. Les employé·e·s s’épuisent vite, et il y en a très peu qui restent jusqu’au bout.

Puis, un jour, j’ai pris la décision de me dire que je n’étais plus en accord avec ces valeurs, que je voulais arrêter. J’étais cependant un peu coincée dans une prison dorée, je me demandais comment j’allais me passer de ce salaire et de ces conditions. Finalement, au moment où j’ai décidé d’arrêter, je me suis rendue compte que ça allait très bien, que je pouvais vivre de manière confortable avec beaucoup moins. Il fallait surtout franchir le cap, car on a l’impression que l’on a besoin de plein de choses qui sont en fait des désirs et non pas des besoins.

L’entreprenariat était vraiment la solution pour faire ce qui me plaisait. Cela m’a apporté la liberté de défendre mes idées sans avoir à rendre de comptes à un employeur.

Quel est le but de The Positive Project ? Pourquoi ce nom ?

Pour le nom, c’était un processus où j’ai essayé de mettre plein de mots ensemble, je voulais transmettre facilement ce qu’on voulait faire. Au final, je voulais apporter un changement en donnant un exemple positif. On entend beaucoup d’histoires tristes sur la situation du monde, et le but était de montrer qu’il y a aussi beaucoup d’impacts positifs, à tous les niveaux.

D’ailleurs, dans nos statuts, le but est d’avoir un impact positif sur la société, ce qu’on fait en donnant du conseil en finance et en durabilité aux entreprises. On le fait aussi par la communauté B Corp : en tant qu’entreprise certifiée B Corp, nous avons un standard de qualité à respecter en ce qui concerne nos engagements et nos actions, et on essaie constamment d’aller au-delà.

Quels sont tes prochains objectifs ?

Au sein de The Positive Project, nous avons récemment déclaré l’urgence climatique, qui est très importante pour nous. Le but est de transmettre le message, le plus possible, qu’il faut rejoindre ce mouvement d’entreprises qui s’engagent pour agir vite et bien, il ne nous reste pas beaucoup de temps.

J’aimerais aussi partager plus de différents projets positifs à travers des petites vidéos, peut-être même faire un podcast une fois. Pouvoir aider d’autres entreprises à acquérir la certification B Corp ou à entreprendre une démarche de durabilité.

On croit énormément dans le mouvement et la communauté B Corp et Swiss Triple Impact au sein de The Positive Project, alors on aimerait aussi beaucoup contribuer au développement de la certification, en Suisse et dans le monde.

Entre tes casquettes de maman, conseillère communale, membre d’association et entrepreneuse, tu dois avoir un agenda et un cerveau surchargés. Comment fais-tu pour t’organiser ?

Bon, tout cela vient aussi avec certaines problématiques comme le sommeil, où il m’arrive très souvent de me réveiller au milieu de la nuit avec le cerveau qui tourne et en pensant aux délais et aux affaires en cours. C’est un problème qu’il faut apprendre à gérer.

C’est vrai que je fais beaucoup de choses. Je fais de mon mieux pour être le plus présente possible, et cela passe aussi par le fait de devoir jongler entre plusieurs activités en même temps. Par exemple, il peut m’arriver de lire mes mails au Conseil communal si je ne suis pas impliquée dans le débat en cours. C’est un mix de choses. J’aimerais aussi réussir à répondre un peu plus vite à toutes les sollicitations, car je suis souvent en retard. La solution serait peut-être des journées plus longues. Ou un clone ? (rires).

Néanmoins, l’avantage est d’être confrontée à plein de mondes différents : l’associatif, le politique, le business. Ce qui me nourrit, c’est d’être en contact et d’échanger avec d’autres personnes, et c’est vraiment ce que je trouve par mes activités. Je me dis aussi que plus je suis active, plus je peux avoir un impact. Si j’ai de l’expérience politique, je peux agir là où les choses se font, et je peux utiliser mon expérience professionnelle, militante et associative pour apporter de la pratique, au-delà de la théorie. Avec tout ça, on a forcément un impact, à force.

Parlons long-terme : où te verrais-tu dans 10 ans ?

Mes enfants seront plus grands, ce seront des adolescents, ils vivront déjà un peu plus leur vie. Moi, je ne sais pas si j’aurai continué jusque-là au niveau politique. En ce qui concerne The Positive Project, j’aimerais bien que l’entreprise se développe. Pas dans une vision de croissance économique comme on l’imagine d’habitude, mais plus dans une optique d’avoir plus de personnes impliquées qui peuvent accompagner les entreprises. Peut-être que dans 10 ans, on aura fait un bout de chemin et on pourra être 20 ou même 30 ? Qui sait, devenir une petite PME ?

Un dernier mot pour la route ?

Quand j’ai fait HEC, on n’avait pas du tout cette vision de durabilité et d’éthique. J’ai vu un grand changement avec la génération d’aujourd’hui. Je me suis beaucoup occupée du recrutement dans les Big Four, et quand la nouvelle génération vient on nous demande nos valeurs, nos engagements pour la communauté, etc.

Je trouve ça super qu’il y ait cette pression qui soit là sur les entreprises, et que les étudiant·e·s d’aujourd’hui aient cette ouverture et prennent en compte leurs valeurs, au-delà du profit et au-delà de la richesse. C’est vraiment cette génération qui va changer les choses, j’ai beaucoup d’espoir.

Merci à Sara pour le temps accordé à cette entrevue, et nous lui souhaitons beaucoup de succès pour la suite de son parcours !

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Dilane Andrade Pinto
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