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Comment gérer brillamment son association d’étudiant·e?

Cela fait maintenant trois ans et demi qu’HEConomist est ma raison de venir sur le campus. Lourd péché que celui-ci ou aveu délicat à vous de choisir. Quoi qu’il en soit, avant le sourire et les rires, l’épée était lourde, ça je peux vous en assurer mais avant d’en arriver là, un peu d’histoire personnelle se fait sentir. Vous l’aurez donc compris, on part sur un mélange simple et sobre (non) de 3ème et de 1er degré mélangés dans un verre à cocktail de grande taille mais de petit débit, ce qui en fait un verre pas très pratique mais on boit d’abord à l’encre de ses idées n’est-il pas ?

En postulant dans le journal des étudiant·e·s d’HEC Lausanne (UNIL), je ne savais pas sur quel rafiot j’embarquais, et si dans cette association je me dirigeais plutôt vers le Cercle des poètes disparus ou Le Clan des sept, mais les mots me plaisaient et au final j’y ai rencontré les deux. Mon premier jour, eh bien je suis arrivé en retard avec un livre de Boris Vian sous le bras comme peuvent le décrire par ‘habitude’ mes acolytes éparpillé·e·s à travers l’Unil et les âges. Rude début pour un entretien me direz-vous, mais vite rattrapé à la première question sérieuse que l’on te pose concernant ta motivation à intégrer l’association.

« Est-ce le fait d’écrire qui t’intéresse ou est-ce le fait d’avoir une sorte de deuxième famille? »

Hook: Why Steven Spielberg Doesn't Like It (But Audiences Do ...

Bon, le ton est donné. Les associations qui roulent à travers l’Unil aujourd’hui ont d’ailleurs bien compris ce parallèle et son importance, celles qui sont encore tarabiscotées cherchant l’équilibre de l’Albatros vacillant sur l’un des rondins de bois de la Banane, n’ont qu’à s’inspirer de cette phrase et s’en faire une maxime. Ensuite du temps, il s’en passe, on l’utilise presque comme sucre tellement ils accompagnent les cafés de jadis durant ces après-midi de printemps. On oublie presque à quel point amphimax est un bâtiment lumineux. Arrive ensuite l’heure du premier article. L’angoisse. Thème ? Sujet ? Vin rouge ? Que de questions auxquelles je sais maintenant répondre en commençant par la fin et auxquelles j’avais répondu «  La fête du slip » en 2017.

Un premier article, c’est comme vouloir partir au bal de promotion en enfilant ses plus beaux habits d’apparat, et se rendre compte que la garde-robe de la grand-mère Jacqueline est quelque peu démodée. Cependant, derrière les draps et les rideaux de poussière se cachent toujours des merveilles. Hâtons nous maintenant avec une petite ellipse qui va au-delà des cimes saluer mes vieux articles en passant par les catacombes pour arriver en pleine réunion hebdomadaire.

Le regard dans le vague et les idées dans le tiroir (voir la photo de couverture), voici comme je me suis senti lors de la première réunion en septembre, que j’ai animé sans ma crapule de meilleur ami qui était le président sortant d’HEConomist et dès lors, on apprend, on apprend sur soi, sur les autres et certains soirs de pleine lune sur les deux en même temps !

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« Une association est le meilleur cours que vous puissiez prendre dans votre cursus car les crédits sont pour vous-même. »

Là est notre arrêt. L’association est un théâtre des sens, que j’assimile presque à une petite entreprise tellement on y travaille sérieusement mais ici vous pouvez essayer, voir ce qui marche ou ce qui ne marche pas et apprendre dans un environnement qui se veut bienveillant et que l’on construit chaque jour afin qu’il le reste. Être président d’une association d’étudiant·e·s mais qu’est-ce donc au final ? Outre les aspects premiers d’organisation, de tenir une réunion ordonnée entre quinze et vingt personnes toutes les semaines, l’apprentissage fondamental d’un·e président·e d’association se fait avec son équipe, sans quoi rien n’aurait de sens, jusqu’à même ce titre !

La partie intéressante de ce rôle est d’être flexible entre le corps et le cœur de l’association. Si nos projets comme le focus ou nos articles sont le papier sur lesquels nous nous exprimons, les mots, l’encre et la plume sont bien nos rédacteur·rice·s. C’est là, le cœur palpitant de notre association dont la plume inventive vous berce tous les jours du lundi au samedi, ne l’oublions pas ! Chaque avis compte, chaque idée doit être entendue qu’elle soit bonne, mauvaise ou bizarre. Il est donc primordial de s’assurer que tout le monde puisse exprimer son opinion, et même celles et ceux qui n’osent pas le faire en groupe. Je prends souvent un peu de temps hors des réunions pour discuter avec les personnes dont les lèvres voulaient s’ouvrir mais où les mots ont filé à l’anglaise pour boire un petit thé (il n’y a absolument pas de moment idéal pour une tasse de thé, ils le sont tous). Mener une réunion ou une discussion c’est bien, mais savoir écouter c’est « plus mieux. » Oh ! Eh, quand je dis écouter je ne parle pas du gus gus de Cendrillon qui fait un fifa avec ses coupains dans le haut de l’amphipole C un jeudi matin. Écouter, ou pratiquer l’écoute active1 disons-le clairement est une autre affaire qu’il faut mener à bien car c’est non seulement pratique mais agréable. Une autre rencontre qui m’a enchanté durant ces années de présidence, c’est celle avec la bienveillance de notre équipe qui souligne bien l’importance des valeurs que l’on partage au sein d’une association. Les valeurs sont le fil d’Ariane qui nous lie les un·e·s aux autres, elles nous rassemblent et elles nous protègent en quelque sorte de vieux de loups de mer aux mœurs et intentions douteuses qui ont visiblement un souci de long terme avec leur maman, et qui de temps à autre essaient de pourfendre notre calme réfléchi à coup de d’article scientifique suédois sur les (in)égalités.

Anecdote à part, on passe sa vie à apprendre et je suis fier d’avoir pu le faire au côté de notre équipe. Aujourd’hui, et bien, je repars avec un livre du même auteur qu’au début de cette aventure sous le bras, cela n’a point changé mais c’est bien la seule chose.

 

Conseils en bonne et due forme
Conseils avisés (à votre discrétion) pour la·e futur·e président·e d’association !

Hook (1991)

L’importance de la réunion après le café !

Euh pardon du café après la réunion mais cela veut tout dire. Après une bonne heure réunion, on prend toujours un café tous et toutes ensemble. La première fois, je me suis dit que c’était complétement chiant et on m’a dit ceci « Jk, la vraie réunion, elle se fait maintenant. Les gens qui sont là, sont le cœur de l’association ». Après deux ans de présidence, je peux vous assurer que cela est vrai. Outre les rendez-vous périodiques pour aller en cours, celles et ceux qui prennent ce temps sont les personnes qui font d’une structure ce qu’elle est, et travaille chaque semaine pour la rendre plus forte. Il y a un lien très fort qui se forme entre les frimousses présentent à ce moment.

À défaut d’un labyrinthe, créez quand même un guide de survie !

L’importance de la transmission de savoirs est souvent sous-évaluée, et un week-end in-out ne suffit pas toujours. Pour parfaire à ce léger problème, une chose simple existe : formaliser vos documents. Créer un guide de l’association est le plus beau cadeau que l’on puisse vous faire quand vous reprenez la boutique (merci Hadri), cela simplifie vos vies et vos nuits. Je ne parle pas d’un drive avec tout le contenu graphique et les factures. Un vrai guide, expliquant l’histoire de l’association, ses valeurs, son fonctionnement pas à pas, ses partenaires etc. autant de détails et de descriptions possibles vous fera gagner un temps précieux, surtout quand il faudra gérer l’intranet et que vous entrez en mode de fonctionnement larmoyant quand le serveur ne répond plus.

Organisation is the key

S’ il devait bien y avoir un commentaire bateau et badaud, ce serait surement celui-là ! Il n’empêche que de dégainer son agenda à la manière de Clint Eastwood reste très classe et pour une personne frivole et bordélique comme je l’étais il y a deux ans, je peux dire que le changement fut radical. Cette nouvelle manière de compter les temps tinte encore la mélodie des cloches de mes journées. Cependant cette organisation-là se joue sur deux mesures distinctes, l’aspect direct entre la planification des réunions, des ordres du jour et du suivi des projet d’un côté et de l’autre l’organisation interne en sens comment les gens se sentent et évoluent dans l’association. C’est quelque chose qui doit primer sur tout le reste. La famille, le travail, les cours restent les priorités, l’association doit être le petit plus à côté qu’on a envie de faire parce qu’on s’éclate à le faire.

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Arrive son lot de responsabilité – Fatuité douce ennemie

Reconnaître ses qualités est un exercice bien difficile pour certain·e·s et bien simple pour d’autres. Au regard de cette remarque, je souligne l’importance d’être humble et de ne pas prendre la grosse tête comme il fut le cas par le passé pour certains présidents d’autres associations (et comme il est le cas dans beaucoup d’entreprises qui me font horreur), mais voir cette position qui vous est accordée comme une responsabilité parce que les membres de votre association comptent sur vous! Les personnes qui sont plus amenées à voir ce «  statut de pouvoir » comme une opportunité (comportement intéressé) vont davantage tendres vers des comportements égoïstes et nuisibles pour l’organisation dans laquelle ils sont et pour leurs collègues. À l’inverse, avoir une responsabilité pour les autres et de la considération conduit à des choses plus lumineuses.

Savoir demander une tâche et comprendre quand ça « bloque »

Selon une étude de nos professeurs Suzanne de Treville et John Antonakis2 sur la motivation intrinsèque, les caractéristiques d’une tâche qui la rendent motivante sont les suivantes :

  • la variété des compétences demandées, même si certaines tâches peuvent se ressentir comme lourde à force de répétition, c’est à vous de faire en sorte d’y ajouter un petit plus ou d’introduire avec l’équipe un nouveau projet.
  • « task identity »—la possibilité de voir le lien entre la tâche et ce qui est produit comme la mise en place d’un événement, disons le Focus. Autrement, le fait d’avoir une idée nouvelle et de la voir se concrétiser rapidement. Cela est d’autant plus important quand une personne est nouvelle dans l’association.
  • le feedback, c’est comme ça qu’on apprend, qu’on s’améliore et que l’on comprend qu’il faut adapter son style d’écriture littéraire à ses lecteurs et lectrices (j’apprendrais toute ma vie sur ce point).
  • une autonomie responsable, c’est à dire donner des responsabilités  aux personnes qui en demandent et les laisser mener tout en étant à côté si le besoin se fait sentir. Cette autonomie est différente d’une autonomie de choix qui peut avoir un effet néfaste sur la motivation ou parlons d’un leadership laisser faire si vous préférez.
  • facilitation du travail, aussi petite que soit la pierre sur votre chemin, on peut être bloqué par cette dernière et moi le premier ! C’est à vous chère président·e de vous rendre compte quand «ça bloque» en prenant un peu de recul sur la situation et en accompagnant aux passages les plus ardus. Un simple mail/ coup de téléphone à un·e partenaire ou à un·e intervenant·e potentiel·le peut causer bien des mots. Ma solution à cela est de s’asseoir autour d’un café et de le faire ensemble.
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«  le Focus est dans 3 jours et les journaux papiers ne sont pas encore arrivés! On fait quoi ? »
Le management inclusif et la note de bienveillance qui passe bien

C’est une façon de vivre plus qu’un tips, mais le management inclusif a toute sa place ici ! Dire « nous » à la place de dire « vous », à la place de dire « je »  fait toute la différence. Valoriser les différences individuelles3, de vie, et toutes singularités, cela devrait être au centre de toute association, mais voyons plus large, même de toute structure ! C’est quelque chose qui me fait tiquer en bien, quand je vois cet effort dans certains cours du master. Ce n’est pas très difficile de le mettre en place si cette façon de fonctionner est déjà partagée par les personnes avec lesquelles on travaille dans nos valeurs. Je tirerai davantage la chevillette ici en soulignant, que faire en sorte que les membres de notre association avec lesquelles on interagit toute l’année se sentent bien en tout temps, est peut-être l’objectif numéro uno de ce rôle qu’on nous a accordé.

Petit épilogue cinématographique

Les images qui arpentent cet article sont tirées d’un de mes films fétiches Hook de Steven Spielberg sorti en 1991. Un Peter Pan fringant interprété par un Robin Williams émerveillant (comme toujours), un Homme qui s’oublie, qui se perd dans le goudron de la vie et la tristesse contemporaine de cette dernière, toujours pressé, dépassé et en retard qui a besoin de se retrouver à Neverland pour enfin se rendre compte des pensées agréables qui le font voler et vivre à nouveau. Vous la sentez la lourde analogie avec le lapin blanc de Alice’s Adventures in Wonderland, de Lewis Carrol qui est toujours en retard ? (petit clin d’œil aux deux reines et organisatrices du bal HEC 2019). Ou plutôt l’analogie avec l’empressement constant de nos existences feutrées rouge vif et couleur pommes cannelle dans lesquelles nous devons finir nos études, trouver un stage, un sens, un but vite vite, vite… Bref, si l’on doit conserver une chose de cette situation biscornue dû corona, c’est que quelque part il ne faut jamais oublier de croire aux fées et à son imaginaire, et de prendre le temps pour soi et avec soi d’ouvrir un roman et de le déguster sans crainte du temps.

Quand j’ai décidé de postuler chez HEConomist, je disais aimé l’absurde et le bizarre, je voulais créer un échange d’intérêts et d’écrits, et faire découvrir ce qu’on ne connaît pas ou découvrir ce que l’on croit connaître. Au final, je me suis rencontré au travers des mots.

Un « leader » sans « follower » c’est ridicule, un président d’association sans membre c’est ridicule, mais alors un Homme sans ami·e·s c’est bien terrible.

Merci à vous tou·te·s !

association
Jean-Konrad Mignon
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Sources

Carl R. Rogers and Richard E. Farson. ACTIVE LISTENING . Excerpt from Communicating in Business Today R.G. Newman, M.A. Danzinger, M. Cohen (eds) D.C. Heath & Company, 1987 John Antonakis, Suzanne de Treville. Could lean production job design be intrinsically motivating? Contextual, configurational, and levels-of-analysis issues. Journal of Operations Management. Volume 24, Issue 2. 2006. Pages 99-123. ISSN 0272-6963, https://doi.org/10.1016/j.jom.2005.04.001. Feldman, M.S., Khademian, A.M., Ingram, H. and Schneider, A.S. (2006), Ways of Knowing and Inclusive Management Practices. Public Administration Review, 66: 89-99. doi:10.1111/j.1540-6210.2006.00669.x