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Le bilan d’un premier semestre en tant que doyenne : interview de la professeure Schmid Mast.

Depuis l’obtention de son doctorat en psychologie en 2000 à l’université de Zurich, Marianne Schmid Mast sillonne les universités suisses afin d’y étendre et d’y partager son savoir. D’abord professeure à son arrivée en 2014 à l’université de Lausanne, elle est ensuite devenue doyenne d’HEC Lausanne en ce début d’année académique. Après un semestre passé à ce poste, c’est l’occasion pour elle de nous partager son expérience et sa vision pour la faculté.

Vous avez eu de nombreuses expériences avant de devenir doyenne, quel a été votre parcours universitaire et professionnel ?

Je dis souvent que je suis un produit suisse : j’ai étudié et fait mon doctorat à l’Université de Zurich, j’ai effectué mon parcours en tant que professeure en Suisse, aux universités de Zurich, de Fribourg, de Neuchâtel et finalement de Lausanne depuis 2014. J’ai aussi fait un post-doctorat pendant 4 ans aux États-Unis avant d’effectuer ce petit tour des universités romandes. Actuellement, je suis professeure en comportement organisationnel et doyenne de la faculté des HEC, ici, à Lausanne.

Que représente pour vous ce poste ?

Ce poste représente pour moi la possibilité de faire évoluer une business school qui est déjà excellente, et même la meilleure buisness school publique en Suisse romande. Je pense que nous sommes déjà une marque et un produit exceptionnel, cependant nous avons encore des choses à optimiser, à parfaire.

Au décanat, nous avons cet engagement 3-D : diversité, digitalisation et durabilité. C’est vraiment sur ces axes que nous aimerions faire évoluer la faculté. A la fois dans l’enseignement et dans la gestion.

Quelles-sont les particularités d’HEC Lausanne que vous avez remarquées au bout d’un semestre en tant que doyenne ?

Je dirais deux choses. La première, c’est un avantage que nous avons et que nous pouvons mettre en avant par rapport à d’autres écoles : le fait de faire partie d’une grande université. Grâce à cela, nous pouvons faire de l’interdisciplinaire et nous comptons développer ce point. De plus, nous disposons d’un campus magnifique avec des écoles voisines de renom, ce qui offre de nombreuses opportunités. C’est aussi un réel plaisir de collaborer avec le rectorat, joindre nos ressources et réfléchir sur des thématiques qui sont chères à la fois à l’université et à la faculté. C’est quelque chose que j’ai découvert et que j’aime beaucoup : être dans le même bateau et aller dans une direction ensemble.

La deuxième, ce sont les liens avec les entreprises et l’industrie dans notre écosystème. Nous disposons du Business Advisory Board, qui est composé de personnes formidables faisant partie de l’industrie et qui nous donnent un feedback sur nos activités. C’est une sorte de sounding board pour nous, nos idées, nos stratégies. Par exemple, si nous voulons proposer une réforme du bachelor, cela nous permet d’avoir le point de vue de la pratique : qu’est-ce qui est nécessaire ? Qu’est-ce que l’industrie attend finalement de nos étudiants quand ils sortent de l’université avec leur diplôme ?

C’est une joie de découvrir tout cela et de travailler avec eux pour faire évoluer l’enseignement et y amener encore plus d’entreprises et de praticiens. Nous avons déjà beaucoup de cours qui font appel à des professionnels, ou avec des projets pratiques effectués par les étudiant(e)s et présentés aux entreprises. C’est une direction que nous aimerions pousser plus avant.

Pouvez-vous nous citer un inconvénient que vous rencontrez dans votre poste ?

Je pense que tout le monde doit répondre la même chose dans ce genre de poste. L’important est de garder un bon équilibre entre juste manager et avoir un réel leadership, c’est-à-dire avoir une vision, une stratégie et faire avancer les choses.

Il y a beaucoup de choses que l’on doit faire chaque jour, le daily buisness, et cela prend déjà 80 % du temps. Il reste donc très peu de temps pour vraiment avoir des idées novatrices et les appliquer. C’est quelque chose que j’ai assez vite remarqué et que j’essaye de gérer au mieux : faire naître des idées et les faire pousser malgré la charge de travail.

Comment voyez-vous la suite et quels-sont vos objectifs pour la faculté et pour votre carrière ?

Pour la faculté, comme je l’ai dit, l’objectif est cet engagement 3-D. Nous avons aussi redéfini nos valeurs : la rigueur, l’intégrité, la collaboration et l’entreprenariat. Les initiales de ces mots donnent « RICE », soit « RIZ » en français. Pour la petite histoire, le riz nourrit plus de 50 % de la population mondiale et RICE, ce sont les valeurs qui nous nourrissent ici, à HEC Lausanne.

Nous sommes donc vraiment en train de les décliner dans toutes nos activités, afin de nous donner une direction, pour aller de l’avant. Par exemple, nous sommes en train de réfléchir à une réforme du bachelor que l’on va calquer sur ces 4 valeurs, y compris pour les compétences enseignées.

En ce qui concerne la rigueur, nous voulons développer encore plus les pensées analytiques et critiques, les statistiques, les maths. C’est quelque chose qui est déjà très ancré à HEC Lausanne, nous sommes connus pour ça et cela fait partie de notre ADN. C’est un facteur différentiel par rapport aux autres, et donc quelque chose que nous aimerions garder et même pousser avec la digitalisation. Essayons d’amener encore plus de réflexion sur comment utiliser les big-data, comment les visualiser, etc. C’est comme un plat déjà très bon dans lequel on ajoute encore des ingrédients un peu plus raffinés : on doit l’agrémenter.

Pour l’intégrité, c’est un autre chemin, qui se chevauche avec la diversité. Avoir cette ouverture sur le monde, nous les responsables, et transmettre cela aux étudiantes et étudiants : être curieux par rapport à l’interlocuteur ou interlocutrice, par rapport aux autres pays, la tolérance et le respect envers des opinions différentes. C’est aussi quelque chose qui nous tient à cœur. Il faut aussi donner un peu plus de visibilité à la diversité qui existe déjà dans notre faculté. Je pense que nous sommes souvent perçus de l’extérieur comme des capitalistes qui courent derrière l’argent. Il n’y a pas que ça dans nos professeur(e)s, collaborateurs-trices, étudiant(e)s. Essayons de montrer qui nous sommes vraiment. Nous avons pour moi une richesse dans cette diversité et quelque chose à montrer au monde finalement.

A propos de la collaboration, il y a quelque chose que nous aimerions bien changer un petit peu. Nous avons l’impression, en partie par notre faute, de créer un environnement très compétitif. Or nous sommes convaincus que les solutions pour le futur se trouvent dans la collaboration, et non pas dans la compétition. En soi, cela n’est pas quelque chose de négatif, mais je pense qu’il faut renforcer cet aspect de collaboration.

Finalement, au sujet de l’entreprenariat, l’idée est qu’il y a des problèmes dans le monde, qu’il n’existe pas une seule personne qui a la solution, et donc qu’il faut réfléchir et essayer des idées ensemble. Nous avons aussi cette approche dans le leadership du décanat : si une idée nous parait bonne, nous fournissons les ressources pendant un certain temps, comme dans la recherche. Nous effectuons un test, nous nous basons sur les données, nous faisons l’analyse, puis nous décidons de continuer ou de corriger notre direction. C’est également une valeur que l’on essaye de transmettre aux étudiantes et étudiants.

Et personnellement, mes objectifs sont les mêmes, je me donne à 100 % au projet (rires) !

Un conseil à donner aux étudiant(e)s d’HEC Lausanne ?

C’est lié à cette ouverture d’esprit, à la curiosité, à l’observation. Il y a tellement de possibilités hors cursus. Certes, la première année de bachelor est difficile, et l’on a peu de temps à consacrer à autre chose que les études à cause de la sélection. Mais théoriquement, quand on avance dans les études, on dispose d’un peu plus de temps. Mon conseil est d’utiliser ce temps pour essayer d’explorer ce qui est déjà dans l’écosystème de HEC et de l’université en général.

Essayer de créer sa propre affaire avec le HUB entreprenariat, s’engager dans une association, aller à des activités du centre sportif… Le but est de créer des ponts entre les expériences plus professionnelles et la théorie que vous voyez en cours. Les liens sont parfois difficiles à voir, mais ils existent. Plus vous aurez l’habitude de faire beaucoup de choses dans votre vie, et plus vous arriverez à faire ces connexions.

Ça, c’est vraiment quelque chose que l’on peut vous offrir. Il y a plein de choses, profitez-en. C’est un univers en soi où l’on peut expérimenter des choses nouvelles. Cela amène à un vrai développement personnel, et c’est finalement aussi cela que l’on fait pendant les études. Ce sont des cours et des connaissances, oui, certes, mais on vit beaucoup de choses pendant cette période, et tout cela va constituer celui ou celle que vous serez dans le futur.

L’ensemble de l’équipe de HEConomist remercie madame Schmid Mast pour le temps accordé et son travail quotidien au sein de la faculté.

Marceau Bergeon
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