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L’EURO AU CENTRE DU DEBAT

Avez-vous déjà aperçu le terme « safe haven Currency » lors de la lecture d’une revue économique ? Il caractérise une monnaie dite peu risquée et très liquide lors de périodes de crises comme nous en vivons de nos jours. Autrement dit, cette monnaie s’apprécie lorsque le niveau d’incertitude économique s’élève. Ce statut de monnaie refuge est souvent attribué à la devise américaine ainsi qu’à la devise suisse. Nous ne pouvons pas en dire autant de l’euro…

En effet, depuis début janvier il a baissé de près de 15% par rapport au dollar. L’année 2022 est l’année de la chute pour l’euro. La monnaie unique n’a jamais été aussi basse depuis 20 ans. Quels sont les éléments déclencheurs d’une telle dépréciation ? Quelles sont les conséquences de ce phénomène ? À qui cela profite ? Tentons de répondre à ces questions.

Causes de l’inflation

Premièrement, la plupart des gens ont eu envie de se faire plaisir, en consommant d’une façon ou d’une autre et ce même si les entreprises décidaient d’augmenter un petit peu leur prix. Alors, en tant qu’entreprise, pourquoi s’en priver ?

De plus, la Chine, que l’on surnomme « l’atelier du monde », a dû fermer plusieurs usines dans le cadre de sa politique zéro-covid. Ainsi pour résumer, nous avons une demande qui grossit et une offre qui se contracte, résultat : les prix flambent…

Ensuite, depuis février 2022, nous ne sommes pas sans savoir que la Russie et l’Ukraine mènent une guerre sans relâche. Le problème étant que les deux pays sont d’importants exportateurs de matières premières telles que le gaz, le pétrole ou le blé. L’impossibilité pour l’Ukraine de produire et les sanctions contre la Russie contractent l’offre ce qui pousse à nouveau les prix à la hausse. Même si les concurrents se prêtent au jeu, il y a aussi d’autres facteurs à prendre en compte. En effet, les gouvernements doivent s’organiser autrement, ce qui implique parfois de trouver des solutions plus complexes et couteuses que précédemment. Ainsi, la forte dépendance énergétique de l’Europe à la Russie rend le futur très incertain surtout lorsque l’on compare cette situation à celle des Etats-Unis, qui parviennent davantage à être autosuffisants. Cette différence se traduit par une préférence pour le dollar sur le marché. Autrement dit, le dollar s’apprécie face à l’euro car jugé moins risqué par les investisseurs. Pourtant, si récession il y a, elle frappera évidemment les deux continents. Cependant, il est plus probable qu’elle soit plus courte et moins forte aux Etats-Unis qu’en Europe. La conséquence de cette dépréciation est que la zone euro devient davantage attractive pour la zone dollar. En effet avec 1 dollar nous obtenons 1,02 euro. Ainsi, nous assistons à une hausse des exportations de la zone euro vers la zone dollar. De plus le secteur du tourisme en Europe devient plus attractif pour les personnes cette même zone. Cependant, la zone euro n’est pas complétement gagnante voire pas du tout, puisqu’elle subit la hausse du prix en dollar du pétrole et des matières premières. A ces prix en dollar, s’ajoutent les frets maritimes qui ont eux aussi augmenté. Tout ceci doit encore être convertis en euro. L’euro étant déprécié, le montant à payer se montre encore plus haut qu’en dollar. Résultats des courses, les entreprises n’ont pas d’autres choix qu’augmenter leurs prix et les consommateurs perdent en pouvoir d’achat. Ainsi, nous comprenons que les importations d’énergies, dont les prix ont explosé, couplées avec la dépréciation de l’euro face au dollar, sont des éléments qui contribuent à la hausse de l’inflation en zone euro.

Enfin, afin de maintenir une certaine stabilité économique, un bon nombre d’Etats ont mis en place des programmes d’aides et de relance qui ont pour conséquence d’alourdir le déficit public. Par exemple, en mars 2022, les Etats-Unis ont annoncé un plan de relance massif de l’administration Biden. Ces dépenses publiques stimulent la demande et alimentent la pression inflationniste. De plus, elles pèsent sur les budgets publics et augmentent la dette. En effet, en France, durant le premier trimestre 2022, la dette publique a augmenté de 88,8 milliards d’euro et s’élève désormais à 114,5% du PIB, d’après un rapport de l’INSEE. Dans le cas des Etats-Unis, cela a permis une relance plus rapide que les autres pays. Cependant, rappelons-nous que l’inflation résulte en premier lieu d’un phénomène monétaire. Ainsi, une augmentation de la quantité de monnaie en circulation, comme cela a été le cas durant le COVID-19, entraîne tôt ou tard une hausse de l’inflation.

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Les nombreux effets de l’inflation

L’inflation influence notamment le taux de change. Lorsqu’une monnaie est dépréciée cela a un effet de dilution sur la devise, ici l’euro perd donc de sa valeur. Toutefois, on peut tenter de contrebalancer cet effet par : un effet de valeur refuge ainsi que par un fort rôle de la devise comme monnaie de réserve. Le dollar, en tant que bon élève, coche ces deux conditions. Depuis la pandémie et les tensions en Ukraine, il a le statut de monnaie refuge. De plus, le dollar est omniprésent dans les réserves mondiales des banques centrales. Pour donner un ordre d’idée, on compte seulement 20% des réserves de changes mondiales en euro contre environ trois fois plus en dollar. Par conséquent, le change du dollar sort moins affecté par l’envolée inflationniste.

Par ailleurs, nous pouvons également observer une corrélation négative entre l’inflation et le taux de chômage. Autrement dit, nous pouvons observer une baisse du taux de chômage lorsque l’inflation s’envole. La courbe de Philips le démontre très bien. De nos jours, nous sommes en période de stagflation. Cela signifie que nous subissons un fort ralentissement économique combiné à une forte inflation des prix. Cette inflation permet aux entreprises de recruter davantage de travailleurs dans la mesure où les salaires réels sont plus faibles. Cela explique en partie la baisse du chômage, notamment en zone euro. D’après Eurostat, il demeure historiquement bas, soit à 6,6% de la population active. Toutefois, cette situation ne devrait pas durer ad vitam aeternam. En effet, lorsque les entreprises auront une connaissance plus précise de l’inflation, le chômage reviendra à son niveau naturel. Le raisonnement derrière cela est le suivant : les entreprises vont devoir augmenter les salaires pour pallier la hausse générale des prix que les travailleurs subissent. Le coût réel des salaires reviendra donc à la normale ce qui ramènera le taux de chômage au niveau naturel qui correspond au taux de chômage d’équilibre, vers lequel l’économie tend sur le long terme.

Enfin, nous pouvons noter que les banques centrales peuvent également influencer le taux de change via les variations des taux directeurs mais également par modification des spreads. Les spreads désignent une marge qui s’applique aux États dès lors qu’ils souhaitent emprunter sur les marchés de capitaux. Cette marge varie en fonction de la santé économique du pays et donc de sa capacité à rembourser les investisseurs. Par ailleurs, la Banque de France a observé une relation négative entre taux de change et spreads. Autrement dit, les pays considérés comme risqués par les investisseurs obtiennent un spread de taux élevé et un taux de change faible soit une dépréciation de la devise.

Ainsi, nous avons expliqué les principales causes de l’inflation, qui s’est traduit notamment par une variation du taux de change et du chômage. Nous avons également vu que les Banques Centrales peuvent influencer le taux de change. Durant toute l’explication, nous nous sommes focalisés sur la parité euro-dollar. Cependant, nous pouvons aussi observer les mêmes phénomènes avec la parité euro-franc suisse. En effet, aujourd’hui on obtient 1 EUR pour 0,97 CHF. Cette appréciation du franc suisse est une aubaine pour les travailleurs frontaliers vivant dans la zone euro. Toutefois, cette situation pourrait accentuer les inégalités sociales entre les travailleurs frontaliers et ceux de la zone euro. De façon plus générale, la situation actuelle favorise les importations de la zone euro vers la zone dollar ou franc suisse.

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Caroline Calvignac
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Sources:

https://www.vie-publique.fr/eclairage/286365-pourquoi-leuro-est-il-au-plus-bas-depuis-20-ans-face-au-dollar

https://www.vie-publique.fr/eclairage/286182-inflation-les-causes-de-la-soudaine-hausse-des-prix

https://www.allnews.ch/content/points-de-vue/la-valorisation-du-franc-n%E2%80%99est-pas-%C2%ABch%C3%A8re%C2%BB

https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/la-depreciation-de-l-euro-face-au-dollar-ajoute-de-l-inflation-a-l-inflation-925788.html

https://www.taurillon.org/chomage-et-inflation-quels-liens

https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/haute-savoie/depreciation-de-l-euro-face-au-franc-suisse-quelles-consequences-pour-les-frontaliers-de-haute-savoie-2613672.html

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