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Pourquoi les femmes scientifiques sont-elles invisibles ?

Quel est le point commun entre la découverte de la fission nucléaire, celle du traitement contre la lèpre et celle du premier pulsar ? Ce sont toutes des trouvailles, fruits de plusieurs années de recherches d’esprits brillants, me diriez-vous ? Des découvertes qui ont façonné l’histoire de l’humanité et ont changé notre quotidien de la plus intense des manières ? Vous n’auriez pas tout à fait tort mais vous seriez aussi quelque peu éloign.é.es de la vérité. En effet, toutes ces avancées scientifiques indéniables cachent une triste vérité : elles ont la malheureuse particularité d’avoir été volées à des femmes.

PORTRAITS DE FEMMES, PORTRAITS DE SCIENTIFIQUES

Lise Meitner, née en Autriche en 1878 dans une famille juive, étudie la physique nucléaire à une époque où l’université même était fermée aux femmes. Elle travailla en tant qu’assistante auprès d’Otto Hahn, un autre scientifique, avant de fuir le régime nazi à l’aube de la Seconde guerre mondiale. Alors qu’elle avait pourtant travaillé pendant des années sur la fission nucléaire, Lisa Meitner sera pourtant écartée des publications et son rôle dans cette découverte sera glissé sous le tapis tandis que son collègue masculin Otto Hahn recevra un prix Nobel de chimie pour cette découverte.

Alice Ball fut une chimiste américaine née en 1892 qui travailla sur le traitement contre la lèpre et qui sera la première femme et la première personne afro-américaine diplômée de l’Université d’Hawaï. Morte à l’âge de vingt-quatre ans, elle n’aura pas le temps de publier ses résultats mais le directeur de son université, lui, ne se gênera pas pour le faire à sa place, tout en s’attribuant les mérites de cette découverte. Ce n’est qu’en 1977 que la « maternité » de cette découverte sera justement attribuée à Alice Ball.

Jocelyn Bell est quant à elle une astrophysicienne britannique née en 1943 qui, dans le cadre de sa thèse universitaire, découvrit les pulsars, qui sont des étoiles à neutrons tournant très vite sur elles-mêmes et des objets astronomiques jusqu’alors encore inconnus dans le monde scientifique. Pourtant, c’est son directeur de thèse, Anthony Hewish, qui obtiendra à sa place le prix Nobel de physique en 1974 pour la découverte des pulsars.

L’EFFET MATILDA

Comment comprendre ces spoliations ? Margaret W. Rossiter, historienne américaine, développa dans les années 1990 un concept pour désigner l’oubli et le manque de reconnaissance dont les femmes sont victimes dans le monde des sciences. Théorisé sous le concept « effet Matilda » (en hommage à la féministe américaine Matilda Joslyn Gage qui remarqua ce phénomène déjà au XIXème siècle), le terme permet de désigner ce phénomène où les scientifiques hommes s’approprient le travail de leurs collègues féminines et s’accaparent les louanges de découvertes dont ils ne sont pas propriétaires.

Doublement injuste et contrariant, ces femmes étaient des collègues, des assistantes, des étudiantes dont le travail a d’abord été minimisé ou, pire, tourné en ridicule avant d’être volé. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce phénomène relativement courant n’épargne même pas les grands noms de la science ni les grandes découvertes, touchant même les si renommés prix Nobel. L’effet Matilda met en avant un autre concept conjoint à ce dernier, celui du « plafond de verre » que subissent les femmes. Ces freins invisibles empêchant les femmes de faire carrière et d’accéder à des postes à haute responsabilité sont particulièrement présents dans le monde de la science où les femmes peinent encore à se faire une place.

Science
Ismira Mahmutovic
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Sources:

Rossiter, M. W. (2003). L’effet Matthieu Mathilda en sciences. Les cahiers du CEDREF. Centre d’enseignement, d’études et de recherches pour les études féministes, (11), 21-39. https://lelephant-larevue.fr/dossiers/jocelyn-bell-la-tenacite-non-recompensee/ https://histoireparlesfemmes.com/2015/03/19/lise-meitner-oubliee-du-prix-nobel/ https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Matilda