« Atténuation du changement climatique »
Le 4 avril dernier, le 3ème et dernier volet du rapport du GIEC a été publié. Il a déclenché une vague de panique sur les réseaux sociaux avec ce message principal : « Nous n’avons plus que 3 ans pour sauver notre planète ».
Sans contexte, ce sont des mots forts et qui font peur.
Nous allons donc parler des éléments principaux pour mieux comprendre ce qui amène à cette conclusion, mais aussi des différentes solutions présentées pour éviter la catastrophe.
1. Précisions
Qu’est-ce que le GIEC ?
Son acronyme veut dire : « Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat ». C’est une association qui regroupe 195 pays et des centaines de chercheurs bénévoles.
Pour ce nouveau rapport, les chercheurs ont simulé environ 150 scénarios (et plus) avec de multiples critères, mais surtout entre les différentes actions prises par la population mondiale (avec actions immédiates ou non).
Pourquoi ce rapport ?
Ce rapport se tient en 3 volets et tous ont pur sujet le changement climatique, ou comment ne pas dépasser le réchauffement climatique de plus de +1,5°C (idéal) ou de +2°C (plus réaliste). Cet accord du G20, fixé en 2021, est aujourd’hui gravement menacé, et cette 3ème partie présente, entre autres, des solutions pour éviter le point de non-retour.
2. Contexte
Malgré un taux de croissance moins élevé entre 2010 et 2019, les émissions anthropiques totales nettes de gaz à effet de serre (GES) ont augmenté de +12 % depuis 2010, et de +54 % depuis 1990. Les émissions annuelles moyennes ont même battu le record d’augmentation depuis des décennies. Cette augmentation est due en grande partie aux énergies fossiles comme le pétrole, suivie par le CH4 et l’utilisation des sols.
A ce rythme, les émissions nettes de CO2 cumulées entre 1850 et 2019 représentent près de 4/5ème du budget carbone total1, et donne ainsi une probabilité de 50 % de réussir l’objectif de +1,5°C. Dans le cas des +2°C, cela représente 2/3 du budget et une probabilité de 67 % de limiter le réchauffement climatique.
A noter qu’au débit de l’année 2020, en pleine crise de COVID-19, les émissions de CO2 ont chuté de manière significative, ce qui donne un peu d’espoir que tout n’est pas perdu et qu’il est possible d’agir.
3. Les origines des émissions
Globalement, les émissions ont augmenté un peu partout, mais les plus notables sont celles qui proviennent des régions urbaines.
En 2019, 34 % des émissions totales sont dues au secteur de la demande, 24 % au secteur de l’industrie, 22 % de l’agriculture, la foresterie et l’utilisation des sols, 15 % des transports et 5 % des bâtiments.
Ici, il est important de relever que les efforts de réduction de CO2 « provenant des combustibles fossiles et des processus industriels ont été inférieurs aux augmentations des émissions dues à la hausse des niveaux d’activité mondiaux2 »
Un autre problème vient du fait que les émissions varient largement suivant les régions et sont fortement liées aux différents niveaux des salaires. Ainsi, à l’échelle mondiale, les 10 % des ménages dont les émissions de GES par habitant basées sur la consommation sont les plus élevées (environ 34-45 %) représentent une part très disproportionnée des émissions mondiales.
Les 90 % restants sont divisés ainsi : 40 % des ménages moyens contribuent à 40-53 % des émissions mondiales et les 50 % du bas à 13-15 %.
Il faut aussi dire que dans les 50 % du bas de l’échelle, on retrouve beaucoup de pays sous-développés qui n’ont pas accès aux nouvelles technologies plus durables et aux services d’énergies modernes. Ce qui est intéressant est que le fait d’éradiquer la pauvreté extrême, la pauvreté énergétique et de donner un niveau de vie décent à la moitié des ménages mondiaux, tout cela dans une démarche de développement durable, peut être atteint sans croissance majeure des émissions mondiales.
4. Pourquoi 3 ans ?
Les simulations ont montré que les émissions allaient atteindre leur plus haut pic entre 2020 et 2025 et que sans actions de la population et des politiques plus strictes concernant le climat, elles continueraient de s’élever après 2025 et amèneraient à un réchauffement climatique de +3,2°C à +3,5°C.
Pour atteindre au moins un des 2 objectifs (+1,5°C ou +2°C), il faut donc absolument que les émissions mondiales de GES baissent profondément et au plus tard en 2025, sans quoi nous ne pourrons plus revenir en arrière. C’est pourquoi il est indispensable d’agir rapidement, voir immédiatement, et par la suite continuer les efforts fournis jusqu’en 2030, 2040 et 2050.
Si ce challenge est réussi, les simulations ont montré que les émissions mondiales nettes de GES devraient diminuer de 27 % par rapport à 2019 d’ici 2030, puis de 63 % d’ici 2050 pour atteindre le scénario de +2°C. Dans le scénario des +1,5°C, cela irait même jusqu’à 43 % en 2030 et 84 % en 2050.
5. Des bonnes nouvelles
Au moins 18 pays ont réduit leurs émissions de GES depuis plus de 10 ans.
Le prix unitaire de plusieurs technologies à émissions faibles n’a pas cessé de baisser depuis 2010.
L’expansion croissante de politiques et des lois relatives à l’atténuation ont amélioré l’efficacité énergétique, réduit les taux de déforestation et accéléré le déploiement de technologies et ainsi permis de réduire, voire supprimer certaines émissions.
6. Les solutions possibles
Nous avons déjà des outils et des technologies à disposition et qui sont efficaces, il faut maintenant bien les utiliser et pousser la population et les industries à les mettre à profit.
Les technologies numériques, comme l’intelligence artificielle ou la robotique par exemple, peuvent contribuer à l’atténuation du changement climatique en améliorant la gestion de l’énergie, en faisant accroître l’efficacité énergétique et en favorisant l’adoption de nombreuses technologies à faibles émissions (énergies renouvelables, etc.).
L’utilisation de l’acier, du ciment, du plastique, peut être remplacée par des matériaux plus durables et efficaces, ce qui permettrait de diminuer les émissions si cela est couplé avec une gestion de la demande plus limitée.
La construction ou la rénovation de bâtiments peut être faite avec des matériaux à faibles émissions et en intégrant des énergies renouvelables dans le processus de construction. Puis, lors de la phase d’habitation, il existe des équipements durables comme des panneaux solaires ou des petites turbines à vent, qui permettent une optimisation de l’usage du bâtiment.
Les émissions dues au secteur du transport peuvent être encore réduites grâce aux voitures électriques et aux carburants bio. Cela participerait grandement à l’atténuation des émissions de CO2, et offrirait même d’autres bénéfices, comme une amélioration de la qualité de l’air, des avantages pour la santé et un accès équitable aux transports.
Renforcer la biodiversité, re-forester, préserver la forêt, conserver les écosystèmes naturels, améliorer la gestion durable de la forêt et celle de l’utilisation des sols sont toutes des options qui peuvent réduire les émissions de CH4, un des principaux gaz émis par l’agriculture.
Créer des espaces verts en ville, réaliser des plans urbains durables en intégrant des toits ou des façades de végétation peut diminuer le risque d’inondations, de pression sur les canaux d’égouts, les effets d’îlots de chaleur urbaine, et peut aussi offrir des avantages pour la santé en diminuant la pollution présente dans l’air.
Réduire le gaspillage alimentaire, l’électrification des systèmes urbains, des infrastructures vertes, les énergies solaires, la gestion de la demande, l’amélioration des gestions de zones vertes, etc… Toutes sont des mesures viables et supportées par la population, et ont un impact notable sur le pourcentage d’émissions et ainsi sur le réchauffement de la planète.
Le tout est de déclencher une pensée socio-culturelle commune et un changement de comportement, car si nous réduisons notre demande et continuons à avancer en faveur du climat, alors nous pourrons diminuer d’entre 40 % et 70 % nos émissions d’ici 2050.
Dans la même thématique, la rédaction vous propose les articles suivants :
1 Budget carbone total : quantité maximale d’émissions anthropiques mondiales nettes cumulées de CO2 qui permettrait de limiter le réchauffement climatique à un niveau donné, ici +1,5°C ou +2°C
2 Source : https://bonpote.com/nouveau-rapport-du-giec-agir-coutera-moins-cher-que-le-business-as-usual/
https://report.ipcc.ch/ar6wg3/pdf/IPCC_AR6_WGIII_SummaryForPolicymakers.pdf