Lumière sur le calendrier de la mode

Les collections automne/hiver en mars et celle printemps/été en septembre ? Comment se déroule une année dans le monde de la mode et quels sont les coulisses de cette industrie ?

Tout d’abord, un peu de contexte : de nos jours, nous, consommateurs, mettons une pression immense sur le dos des grandes marques de prêt-à-porter et de luxe car nous en voulons toujours plus et toujours plus souvent. En effet, nous sommes dans une société où les grandes marques présentent quatre collections par année lors des défilés de la « semaine de la mode », dont deux collections intermédiaires « croisière » et « pre-fall ». Ces deux dernières ont typiquement été créée pour donner suite à l’augmentation de la consommation et de la tendance des marques de fast-fashion à proposer des nouveautés quasiment chaque mois. Concurrence oblige, les autres marques se sont alignées et nous nous retrouvons ainsi avec un calendrier de la mode effréné entre les quatre défilés par année, mode féminine et masculine, sans compter que les marques ont plusieurs lignes de vêtements, comme le prêt-à-porter ou la haute couture, et que chaque ligne représente deux défilés !

Quelles sont alors les implications pour toute cette organisation ?

Il faut savoir que pour réussir à tenir le rythme, toute collection se planifie une année à l’avance. La première étape est de choisir les bons textiles et les bonnes matières pour leurs vêtements. L’industrie du textile étant étroitement liée à celle de la mode, car indispensable pour son bon fonctionnement, les marques participent à des salons professionnels où les travailleurs du textile sont présents et introduisent les prochaines tendances pour l’année suivante. Ce salon se déroule en janvier et, en février, les pièces du défilé présentées en octobre de l’année précédente sont mises en boutique, mais celles-ci ont été dessinées bien avant. L’industrie de la mode a donc toujours une longueur d’avance !

Durant le salon, toutes les gammes de marques sont là : du luxe au bas de gamme en passant par le semi-luxe, tous se penchent consciencieusement sur les différents produits et choisissent le plus adapté à leur clientèle. Forcément, une grande marque de luxe produisant de la haute couture se tournera vers des textiles différents qu’une marque de grands magasins. Les textiles sont alors de plus ou moins bonne qualité et seront considérés de plutôt court ou long terme. Il en découlera alors les termes de « pièce intemporelle » ou « fast-fashion ». On peut aujourd’hui observer une tendance à la deuxième car elle est plus souvent renouvelée et très facile d’accès.

Mais comment se crée une tendance, qu’elle soit de tissu, couleur, forme ou motif ? Souvent, ce sont les marques de luxe qui donnent le ton aux gammes inférieures car leurs noms sont les plus respectés. Leurs collections sont donc les plus en vue sur le marché et, ainsi, les petites enseignes s’en inspirent pour pouvoir rendre la mode accessible à tous. Mais alors comment tout ce petit monde se démarque-t-il des autres et satisfait le besoin de nouveauté toujours plus pressant des acheteurs ?

Textile, Couleur, Coloré, En Tissu, Texture

Il existe plusieurs manières de faire : s’associer avec d’autres marques (co-branding) pour ajouter une plus-value supplémentaire et satisfaire deux fois plus de clients potentiels, ou alors créer des collections « capsules » composées de pièces en édition limitée ou s’inspirant d’une culture différente que celle de la marque à la base. Toutes ces solutions impliquent des défilés supplémentaires, du marketing supplémentaire et des soldes supplémentaires pour vendre la marchandise invendue dont les gens se lassent dès qu’une nouvelle collection est sortie…

Ainsi, dans cette course à la nouveauté et à la distinction, les produits perdent en qualité et en originalité car le cycle est trop rapide pour pouvoir fignoler le tout et s’attarder sur les détails. De plus, les marques et les grandes enseignes en arrivent au point d’organiser des soldes exceptionnels allant jusqu’à -80% sur les collections ou ouvrir des magasins « outlet » où le prix sont réduits pour réussir à vendre les anciennes collections. Tout cela mène à une pollution énorme pour plusieurs raisons : lors du Black Friday par exemple, la majorité des achats sont faits en ligne et donc nécessitent d’être envoyés et transportés par la poste ; les invendus seront brûlés et la production des quatre (minimum !) nouvelles collections joue aussi un énorme rôle dans l’émission de gaz à effet de serre. Il existe bien sûr des alternatives et le monde de la seconde main fait gentiment entendre son nom, mais les mentalités doivent vraiment changer pour qu’on puisse observer de réels impacts sur le monde de la mode.

Pour aller plus loin…

Si le monde du textile vous intéresse et que vous aimez les romans policiers, je vous conseille le livre « Je te protègerai » de Peter May ! Une incroyable enquête avec un trait d’industrie textile et un brin de mode.

Emma Balet

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